Pour en finir avec l’urgence du quotidien scolaire

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Je n’ai pas le temps… Je vais manquer de temps… Je n’aurai pas le temps de couvrir tout le programme d’ici juin… N’est-ce pas quelques-unes de complaintes que tous les enseignants ont formulées plusieurs fois dans leur vie professionnelle ? Alors que la nouvelle année scolaire est bel et bien en branle, essayons de briser la perception négative de la temporalité que nous entretenons et qui nous afflige en nous recentrant sur la véritable nature de l’éducation.

Je n’ai pas le temps !

C’est un triste constat ! S’il y a une chose que nous avons en ce bas monde c’est certainement du temps ! Nous en avons tellement que le réel problème est de gérer son abondance et de l’organiser : notre temps personnel, notre temps familial, notre temps professionnel, etc. La réalité est que si vous n’avez pas le temps pour un élève, un collègue ou un parent, c’est que vous craignez que ce temps à prendre empiète sur un autre temps, le vôtre par exemple.

Ne pas avoir le temps, c’est se fermer à l’autre. C’est le refuser, le rejeter au nom de la prédominance du moi. C’est également se fermer à la sérendipité et au hasard qui impliquent forcément flexibilité et adaptation de notre part. C’est la négligence de vivre l’instant présent pour mettre l’accent sur ce qui s’en vient au nom du respect de notre planification de cours qui, bien souvent, a été élaborée il y a quelques années ! Vivre dans l’appréhension négative du futur, ne l’oublions pas, c’est entretenir le mal du siècle chez nos jeunes : l’anxiété.

Ne pas avoir le temps, c’est nier la raison fondamentale pour laquelle nous sommes des professionnels de l’éducation et que nous avons choisi cette profession : l’autre.

Ironiquement, ceux qui n’ont jamais le temps de prendre le temps (!) sont souvent ceux qui en exigent le plus auprès de leur direction ou de leurs collègues. Vous savez ces fameux : as-tu-trente-secondes-pour-moi-qui-prennent-plutôt-dix-minutes ? C’est une belle ironie !

Prendre le temps

Vous n’avez pas le temps ? Prenez-le ! Il s’agit d’un geste volontaire de mettre les autres choses qui occupent nos journées de côté pour ce concentrer sur ceux qui ont besoin de nous. Le temps est élastique et cette même élasticité instille une certaine flexibilité à la nature humaine. Cette conception du temps en éducation permet une adaptabilité et une prédisposition au changement chez les professionnels de l’éducation qui s’émancipent du joug temporel. Changer implique un investissement en temps comme en énergie de la part de l’individu qui souhaite se redéfinir professionnellement. Il s’agit d’adopter une posture d’ouverture à ce qui se passe autour de soi en adoptant une pratique qui est d’abord et avant tout réflexive.

Prendre le temps, c’est s’ouvrir au regard empathique qui illumine le visage des professions œuvrant dans le milieu scolaire.

Pour ce faire, il est primordial de cesser d’entretenir l’état d’urgence quotidien en éducation. Les professionnels de l’éducation sont tous animés par se satané sentiment d’urgence et cette crainte de manque de temps pour mener à bien leurs actions et leur travail. Ne faut-il pas prendre le dessus sur nos inquiétudes liées au « passage la matière » en comprenant, une bonne fois pour toutes, que le vrai programme, c’est celui de la vie que chacun d’entre nous se doit d’enseigner aux élèves qui se succèdent année après année dans nos classes ? Oui, il faut instruire, évidemment, mais avant tout, ne faut-il pas veiller à contribuer au façonnement des humains qui fréquentent nos institutions ? Et cela ne se fait certainement pas dans la hâte !

Prendre le temps, c’est s’ouvrir au regard empathique qui illumine le visage des professions œuvrant dans le milieu scolaire.C’est un détachement volontaire de nos obligations liées à l’instruction des élèves pour se concentrer sur notre responsabilité première d’éducation de ces jeunes humains qui aspirent, à leur tour, à éduquer les plus jeunes. À ceux qui n’ont pas le temps de changer ou qui en ont déjà trop sur les épaules : peut-être est-ce le moment de délaisser certaines habitudes, approches ou attitudes pour vous tourner vers ce qui s’en vient ? Il s’agit de se soustraire au dictat de l’urgence scolaire pour ce qui compte vraiment en éducation : l’autre. C’est ainsi qu’on nourrit l’humanité !

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