C’est triste à écrire, mais ça fait quelques années que le cynisme a imprégné plusieurs sphères de la société occidentale. L’exemple le plus probant exprimant cette réprobation des modèles traditionnels est certainement l’élection de Donald J. Trump. En fait, la remise en question des modèles traditionnels ne m’inquiète pas. Bien au contraire ! Ce qui m’inquiète, c’est la façon dont cela se traduit dans les relations entre les humains.
Même à Percé, un lieu pittoresque et normalement tranquille, un référendum portant sur un projet de développement commercial de 1.8M$ a fait l’objet d’une réelle campagne de peur. Cela s’est traduit par le rejet du projet et la démission de six conseillers municipaux.
De Percé aux États-Unis, je vous dirais bien honnêtement qu’en éducation, l’amalgame cynisme et campagne de peur, c’est du connu !
Il est bien plus facile de s’opposer plutôt qu’agir et s’investir en se responsabilisant. Effectivement, ne rien faire désengage, mais implique une responsabilité ultérieure encore plus lourde ! Bien que cette responsabilité soit bel et bien présente, elle n’est évidemment pas assumée lors de l’échec. Ces critiques blâmeront sans retenue les initiateurs de la démarche de changement pour l’échec survenu, alors que leur désinvestissement est certainement autant à blâmer, sinon davantage. Ils ne réalisent pas qu’ils participent plus au problème qu’à sa solution. Bref, critiquer donne la possibilité de se désinvestir en se donnant le beau rôle : les critiques pourront toujours dire : « Je vous l’avais dit ! »
Ils justifient leur immobilisme en se permettant de dénigrer ceux qui se démènent pour voir au succès de l’implantation du projet. Comme quoi, pour paraphraser Carl Leblanc, romancier québécois, « certains critiques sont capables de détruire, mais incapables de créer ». Le proverbe ouzbek suivant traduit également bien cette situation : « le confort est l’énergie de celui qui ne veut pas relever de défis ».
Du courage…
le répète ad nauseam. On a besoin de courage en éducation. J’extrapolerais : on a besoin de courage dans la société pour faire changer les choses, et ce, malgré que tous les ingrédients soient rassemblés pour nous faire craindre le pire : contextes financiers difficiles, éclatement des modèles de référence traditionnels, bouleversements sociaux, instabilité politique, etc. Il faut continuer à avoir le courage d’avancer et, justement, il faut se servir des contraintes qui nous sont imposées pour innover : comment un emprunt de 1.8M$ pour une petite ville peut-il servir de levier au développement économique régional et à la réalisation d’éventuels revenus pour une rentabilité rapide ? Dans la même veine, comment peut-on repenser nos écoles, incluant le travail de ceux qui y œuvrent quotidiennement ?
Le courage d’innover n’est peut-être pas à la portée de tout le monde. Chacun a sa personnalité. Cependant, le courage de se rallier est à la mesure de tous. Autrement dit, on peut bien débattre en long et en large, mais quand une décision est prise, il faut se rallier rapidement pour assurer la pérennité de nos institutions. Le courage fait en sorte que tous mettent la main à la pâte et rament dans le même sens pour que le changement mis en place puisse réussir. Quand les humains sont aptes à laisser leurs velléités de côté au profit du bien commun, c’est à ce moment que les liens se tissent et qu’on parvient, tous ensemble, à s’affranchir des forces gravitationnelles qui nous retiennent bien ancrés dans notre confort.
Autant dans les villages que dans le monde de l’éducation, il y a trop de place au leadership négatif, celui qui par la peur, la médisance ou le caquetage réussit à paralyser les autres. Il faut croire que cette dernière se transmet plus facilement que l’espoir ! Présentement, ces timorés ont trop de place dans nos institutions. La norme est de voir ces derniers se plaindre et chialer contre tout. Ils ont une belle écoute de la majorité silencieuse. Et pourquoi ne pas inverser cette norme ? Prendre le plancher pour ceux qui ont des idées et un plan pour les mettre en place, ceux qui osent prendre de « beaux risques » ?
Nous vivons dans une démocratie qui s’ankylose et s’atrophie. Un système où l’oisiveté habite le gros de ses immenses tentacules. La belle ville de Percé vient probablement de le réaliser violemment alors que ceux qui évoluent en éducation réalisent quotidiennement ce qu’il en est. Malheureusement, l’éducation est le royaume des éteignoirs. Il n’y a qu’une façon de s’en sortir : allumer le plus de réverbères possibles.
Il faut bâtir. Il faut innover, et ce, autant à l’école que dans le reste de la société. L’occasion est là pour l’école : devenir la locomotive plutôt que l’éternel wagon à tirer.