La machine à saucisses

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Les systèmes d’éducation de bien des pays occidentaux sont de grosses machines à saucisses. Du moins c’est ce que prétend , professeur à l’Université Oregon. Je reprends ici quelques-uns de ces arguments et j’y ajoute quelques réflexions.

Pourquoi une machine à saucisses ? Parce qu’on prend des ingrédients qui, séparés, ont tous une certaine valeur nutritive et on les combine avec d’autres ingrédients peu recommandables. On place le tout dans le hachoir à viande pour obtenir un mélange est conforme à nos attentes. Toutes les saucisses doivent être identiques, sinon elles connaissent une fin tragique !

Autrement dit, on prend des élèves qui sont, à l’origine, totalement différents les uns des autres grâce à des aspirations, des personnalités et des passions complètement distinctes et nous leur faisons subir une école qui s’évertue à rendre ce mélange le plus homogène possible. En bref, les intrants sont imprévisibles, variés et hétérogènes. Une fois qu’ils sont rentrés dans le système, l’école fait son œuvre : onze années d’homogénéisation des élèves où un système entier conspire à rendre les élèves identiques pour éventuellement, une étape à la fois, un niveau à la fois, recueillir un produit normalisé et complètement prévisible. Dans cette grande manufacture qu’est devenue l’éducation, nous fabriquons des automates. L’école est une usine produisant des élèves transformés. Le problème, c’est que cette transformation est opérée par un système au parcours unique et prédéterminé pour tous. Le système change les jeunes, mais pas nécessairement de la bonne façon. Malheureusement, je souhaiterais que ce soient les individus qui changent nos jeunes et qui les fassent évoluer. Je souhaite également que ce soient les expériences vécues et les apprentissages réalisés qui redéfinissent nos élèves. Oui, l’école est un milieu de changement et d’évolution, mais il faut que ce soit l’aspect humain qui permette cette mutation et non un système désuet !

D’ailleurs, plus j’y pense, plus je réalise que la vie n’est certainement pas plus facile pour les enseignants qui tentent de fonctionner à l’encontre des principes impossibles de la machine à saucisse ! La culture, les collègues et la direction s’occupent de les rappeler à l’ordre !

Le tout, dans l’usine la plus aseptisée qui soit. Les élèves sont surprotégés, et ce, autant à la maison qu’à l’école. On craint tellement pour leur intégrité physique et psychologique qu’on aplanit toutes les possibilités d’obstacles ou de difficultés sur leur parcours. La machine à saucisses doit être bien huilée !

Comme dans n’importe quelle usine de fabrication d’aliments transformés, on évalue le produit final en fonction des standards que le système s’est fixés. Ce n’est pas la saucisse qui détermine le niveau de réussite. Idem en éducation ! Pourquoi l’élève ne fixerait-il pas ses propres objectifs à atteindre pour permettre des parcours mieux personnalisés ? Pourquoi l’enseignant n’accompagnerait-il pas ce dernier, avec les parents de l’apprenant, dans la fixation des attentes ? Plutôt, dans notre glorieuse machine à saucisses, nous blâmons les élèves pour leurs différences au lieu d’être prêts à accompagner des élèves différents et ainsi valoriser la diversité en éducation.  Tout le système d’éducation conspire à normaliser et à modérer les résultats scolaires et les accomplissements des élèves pour satisfaire l’appétit insatiable de la loi gaussienne; ne faut-il pas que nos jeunes s’éloignent trop de la courbe normale ?

 

L’entrepreneuriat à la rescousse !

Ne devrions-nous pas encourager une culture de l’entrepreneuriat autant pour les élèves que pour le personnel scolaire au lieu de cultiver une culture organisationnelle sclérosée et léthargique ? Pourquoi l’entrepreneuriat ? Tout simplement pour offrir des opportunités à nos élèves. De ces opportunités naît la possibilité de résoudre des problèmes complexes de différentes façons. Le 21e siècle est l’âge de la résolution de problèmes faisant appel à la créativité, l’innovation, la collaboration grâce à la pensée computationnelle et l’esprit critique. Où loge l’école à cet égard ? Elle continue à fabriquer des saucisses…

En terminant, Yong Zhao affirme que la société est dans une nouvelle révolution industrielle, où les machines intelligentes prennent de plus en plus de place. La seule façon qui nous permettra de ne pas céder le pas à cet envahissement est de nous distinguer de ces machines. Malheureusement, la machine à saucisse de l’éducation fabrique des élèves qui seront facilement remplacés par des machines. Il n’y a qu’une seule façon d’éviter ce désastre appréhendé : faire entrer l’école au 21e siècle.

 

 

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